Cet article avait été initialement publié (dans une version un peu différente) sur mon précédent blogue.
A travers la vie de Sonia et de ses filles, Brigitte Pilote nous invite à considérer ce qu'il se passe après une période de troubles et pose ainsi subtilement une question essentielle : que devient le monde après les grands événements/discours ?
En effet, tout le monde connait Martin Luther King, répète « I have a dream » dès que le pasteur est évoqué et sait qu'il fut assassiné à Memphis au Motel Lorraine. Ceci est ce que l'on se transmet de génération en génération pour ne pas oublier celui qui est désormais devenu une icône. Mais, l'auteure va ici plus loin et, mêlant habilement réalité et fiction, pose son regard sur ce/ceux qui restent.
Il reste le Motel Lorraine dont plus personne ne veut occuper la funeste chambre 306 jusqu'à ce que Sonia et ses deux filles y logent, n'ayant temporairement pas d'autre alternative.
Dans ce même Motel Lorraine demeure Jacqueline Smith, une femme de chambre qui s'opposera ultérieurement à la fondation d'un musée sur l'emplacement du Motel, arguant que le pasteur King aurait plutôt souhaité y voir un dispensaire.
Il reste aussi une ville meurtrie qui aura besoin de plusieurs décennies pour ne plus être la cité de l'assassinat de Martin Luther King, mais bel et bien la ville que l'on connait de nos jours comme étant le berceau du blues.
En parlant de sa mort, l'auteure parvient ici paradoxalement à redonner vie au pasteur King et à son combat, à « dépoussiérer » celui que l'on a peut-être un peu trop vite rangé dans les livres d'Histoire...