vendredi 15 mars 2019

Canines d'Anne Wiazemski

J'ai choisi de lire ce roman dans le cadre du



dont je complète ainsi la colonne PARTIE DU CORPS de ma première ligne.



J'ai envie de qualifier ce livre de « roman spécialisé ». En effet, l'auteure nous convie au coeur d'une pièce de théâtre en gestation, depuis la constitution de la troupe jusqu'à la première en ouverture du festival d'Avignon. On se trouve au beau milieu de ces êtres qui tentent de s'effacer peu à peu pour laisser place à leur personnage. La frontière entre ces deux aspects d'eux-mêmes demeurant parfois des plus floues.



Contrairement à ce que je fais généralement, j'ai envie ici de commencer par deux citations relevées en cours de lecture.

Page 294

« Il voyait ses deux actrices s'approcher de ce qu'il avait rêvé, cette absolue fragilité du jeu qui donnait au spectacteur le sentiment de surprendre le partie cachée de leur être et, pourquoi pas, de leur voler leur secret.»


Page 311


« Ce spectacle, c'est moi, poursuivait Lucerne. C'est mon coeur déchiré, mis à nu, jeté en pâture. Je ne supporte pas ça. Maintenant que j'ai vu mon spectacle, je voudrais le détruitre ! »



Qu'en pensez-vous ? 

J'avoue que je suis partagée. C'est sublime n'est-ce pas? Et en même temps, on sent tellement la mise en danger à laquelle s'exposent les gens de théâtre, les « tortures » qu'ils s'imposent à eux-mêmes. J'emploie volontairement le mot « torture » comme on l'entend dans l'expression « un metteur en scène torturé », expression qui bien souvent résonne comme un compliment, un label de qualité, une valeur ajoutée.  

On parle ici de théâtre, mais on retrouve aussi cet « acharnement » dans la danse. Et je ne peux m'empêcher de trouver tout de même un aspect «sado-masochiste» à ces démarches artistiques. 

Anne Wiazemski et Jean-Luc Godard en Avignon
Alors oui, c'est à la fois immense, grand, magnifique, mais aussi un peu, à mon sens, irrationnel et insensé, voire inhumain.

En résumé, ce livre est passionnant et j'ai aimé l'immersion dans le monde du théâtre qu'il permet, mais ce n'est, pour moi, absolument pas une invitation à admirer et respecter les gens de théâtre. Au contraire, par moment, j'ai trouvé Lucerne le metteur en scène vraiment pathétique.

Et le cinéma dans tout ça? Même combat? Je ne crois pas... mais c'est un autre débat.